VISION #42 - William Keo
Je rejoins William Keo dans les bureaux et la galerie de l’agence Magnum, rue Léon Frot, dans le 11ème arrondissement. Le photographe me propose rapidement d’en faire un tour ; le lieu est malheureusement vide — j’enregistre le podcast en plein moment de creux, entre deux expositions, celle d’Alex Webb, The Suffering of Light, et Deja View, une collaboration entre Martin Parr et le collectionneur de photos Lee Shulman. Tout juste nominé aux côtés de Myriam Boulos en 2021, William navigue dans cet espace qui lui semble bien familier. « Je passe mes journées ici, j’arrive tôt le matin et je repars tard le soir. Je considère la photographie comme un travail à plein temps. »
Photo : William Keo, Magnum Photos, Saint-Denis, France, 2020, première photo décriteChaque vision est singulière, porteuse de sens et de changement. Le but de ce format est de rassembler de nombreux artistes et que chacun nous délivre sa vision et son expérience de la photographie.
Photos : William Keo, Magnum Photos, Irak & Syrie, en coursNé en 1996, Willam Keo est un photographe franco-cambodgien basé à Paris. Son travail se concentre notamment sur des thématiques comme la migration, l'exclusion sociale et l'intolérance intercommunautaire. Le jeune photographe a une voix douce, posée. Il semble à la fois sûr de lui et de son talent mais toujours très respectueux de ses aîné(e)s et de ses « collègues », notamment de Jérôme Sessini, qu’il cite à maintes reprises dans le podcast.
Photo : William Keo, Magnum Photos, Ukraine, 2022, photo décrite dans le podcastWilliam commence sa carrière en travaillant pour des ONG afin de payer ses études en direction artistique. Depuis 2016, il documente la crise des réfugiés syriens au Moyen-Orient avant de porter son attention sur la Syrie après la chute de l'organisation État islamique. En parallèle, il documente la guerre ukrainienne depuis 2018 et couvre des catastrophes humanitaires telles que la crise des Rohingyas. Entre 2017 et 2018, il se rend au Darfour, au Soudan, pour documenter le conflit en cours et ses conséquences avant de commencer un travail de longue haleine sur sa ville natale, dans le 93.
Photos : William Keo, Magnum Photos, Ukraine: The Killing Fields, en cours« Aujourd’hui, un photographe ne doit pas forcément raconter les choses en premier mais doit mieux les raconter. »
– William Keo
Photos : William Keo, Beautiful Paradox, projet en coursCulture of Violence, qu’il a récemment renommé Beautiful Paradox, a pour but de faire un portrait global de cette banlieue de la Seine-Saint-Denis, organisé en plusieurs chapitres, avec une documentation sociale : pauvreté, migrants, services publics (police, prison, urgences), meetings politiques…William Keo nous décrit d’ailleurs deux photographies de ce projet : la première, une scène de vie, un groupe de migrants jouant aux cartes, et l’autre, un moment suspendu dans un stade de foot local.
William Keo évoque plusieurs sujets : le changement de paradigme de la photographie reportage et documentaire, son rapport émotionnel au noir et blanc et à la couleur, ses compositions multidimensionnelles, aux nombreux sens de lecture, le choix d’une politisation de son travail, sa récente nomination chez Magnum, à seulement 25 ans… Un podcast rafraichissant.
Photo : William Keo, Beautiful Paradox, projet en cours, Aulnay-sous-Bois, la League des nations, dernière photo décrite